Patate is love, patate is life [fermé]

Liseron :

Liseron s’éclipsa dans la seconde pour aller faire peser sa patate douce. Peut-être qu'elle pouvait téléphoner à quelqu'un, dire des choses compromettantes pour sa propre personne à voix-haute, et le jeune homme blond comprendrait qu'elle n'est pas la fille qu'il recherche. Ouais, elle allait faire ça. En patientant pour son tour, la lycéenne se mit à composer dans sa tête un numéro imaginaire, avant de porter son téléphone portable rose à son oreille. 

- O-oui, allô ? Non, je vais pas les garder je te dis ! Mes extensions me font mal au crâne, rends-toi compte un peu, j'ai plus de cheveux à cause de la chimio, j'ai des faux-cheveux accrochés directement sur la tête ! Quoi ? Ah oui, j'ai hâte de retrouver mon jean et mes bask--

"You say potato, I say patattah, you say tomato, I say creole tomatah, let's call the whole thing off ~" retentit la musique de Harry Connick en guise de sonnerie de portable. Le portable de Liseron. Les clients à la pesée se lançaient des regards d'incompréhension, puis Liseron donna son sac plastique au monsieur et décrocha honteusement. 

- Maman ? Oui, oui. Oui, merci. Ah ! Euh... Non ? Non je sais pas, je fais les courses. Ils sont sûrement dans la boîte aux lettres, j'irais voir. Merci. Bisous !

En fait, sa gentille maman lui a envoyé des bonbons à la pâte de patate dont elle seule connaît le secret, par la poste. Et des faits-maisons ! En récupérant son sachet, elle se risqua à se placer à côté du mystérieux garçon, et à le dévisager. Est-ce qu'il avait comprit qu'elle avait prétendu parler à quelqu'un, mais qu'un autre véritable quelqu'un lui avait passé un coup de fil pendant ce temps ? Mais est-ce qu'il avait simplement entendu ou écouté sa conversation ??? 

- Hum, je... Je vais te dire comment je m'appelle. Mais avant, dis-moi si tu es un espion. Et si non, pourquoi tu as envie de me connaître. 

Parce que, même pour les gens maladroits et timides de son espèce, les mots valent parfois mieux que les actions douteuses !

Ryan :

Bon, qu'est-ce qu'il pouvait faire pendant ce temps? Regarder son téléphone? Oui, son téléphone! Le téléphone de Ryan, c'était toute sa vie. Une coque N&N's toute banale, mais pourtant, il comptait si cher à ses yeux! Il y avait toute sa vie dedans. Les photos qu'il prenait, ses contacts, ses réseaux sociaux, des applications qu'il a téléchargé pour le swag (mais qu'il n'utilise jamais) ! En plus, il ne pouvait PAS passer une journée sans y toucher. Il était dessus H24.

Il se mit alors à parcourir les différents posts instagram, en attendant la jeune fille -qui s'était sûrement barrée, il était peut-être entrain d'attendre pour rien. C'est alors qu'une petite tête fatiguée le sortit de ses songes. Il la regarda, souriant, se disant qu'elle ne s'était pas barrée, jusqu'à que..

- ...Hein?

Jusqu'à qu'elle dise..Ce qu'elle vient de dire.

- Un espion? 

Il eu presque envie de pouffer de rire. Lui ? Un espion? Oui, elle devait sûrement plaisanter. Dans le cas contraire, elle jouait beaucoup trop aux jeux vidéos. Il eu presque envie de lui lancer un "oui, et la drogue, c'est mal." mais vu son comportement bizarre, il risquait sûrement d'aggraver la situation.

- Euhm..Non, je ne suis pas un espion. Et je veux te connaître parce que..Euh...

Il posa son regard sur la patate devant lui, puis lui tendit la main.

- Tu as l'air sympa!

Liseron :

Liseron se mit à dévisager le garçon, saisit par la stupeur. C'était un peu incroyable, comme situation. Tu te lèves de bon matin, tu pars faire les courses, tu fais la gueule, tu souris pas, tu vas d'un point A à un point B sans faire attention au monde qui t'entoure, t'as une frange et des cernes qui te cachent la moitié du visage, tout ce qu'on voit quand on surprend ton regard, c'est un air craintif et hostile. C'est ça, avoir l'air sympa ? 

- Tu... Tu trouves ? 

Pas un espion. Juste un lycéen qui voulait faire sa connaissance et qui lui trouvait un "air sympa". Le genre de truc quI aurait pu arriver à la prêtresse des patates que si toutes les planètes s’alignaient, que les météorites dansaient la polka et qu'un trou noir était sur le point d'engloutir la Terre. Un genre de truc très improbable donc en soit, mais qui était arrivé aujourd'hui, pendant qu'elle faisait ses courses au supermarché. 

Après une fraction de secondes d'absence, la jeune fille consentit à mettre sa main gantée dans celle de son interlocuteur, qui, lui aussi avait "l'air sympa". 

- Je m'appelle Liseron.

Parce que ça faisait longtemps qu'elle avait pas eu l'opportunité de se présenter à quelqu'un, elle en avait oublier les conventions, les "et toi ?" et tout ça, du coup elle passait du coq à l'âne :

- La cargaison de patates douces est mauvaise aujourd'hui. Tu devrais choisir une autre variété.

(xD)

Ryan :

Il l'avait perdu. Encore. En plus, elle avait l'air confuse. Il aurait dû tourné 7 fois sa langue dans sa bouche avant de parler ? Mais pourtant, quand on dit à quelqu'un qu'il a l'air sympa, c'est un compliment non ? Elle le prenait mal ? Le blondinet savait pas trop. Il se contenta de sourire.

- Liseron ? Joli nom!

Il acquiesca d'un petit sourire. Liseron, c'était pas une variété de fleur mauve ? Il avait déjà vu ce nom dans un magazine. "Le liseron peut augmenter vos performances sexuelles". Il y avait pas trop cru, donc il l'avais donné à son chien pour jouer avec.

C'est alors que la dite Liseron se mit à..à parler de patates douces? C'était une experte en patates ? Peut-être qu'elle travaillait à la pataterie alors. Elle pourrait peut-être lui payer un repas ? De la purée à la patate douce ? Est-ce qu'elle pourra tout lui apprendre sur les patates? Il fit mine d'être intéressé, mais curieux malgré lui.

- Ah ? Tu me conseilles quoi?

Liseron :

Liseron, pas trop habituée aux compliments, savait pas trop comment réagir et haussa simplement les épaules en se triturant les doigts.

- Euh ben, ç-ça dépend de ce que tu veux manger. La Amandine, ça se cuisine en vapeur ou en salade. On l'appelle la reine des primeurs, on la consomme en début de saison et il faut le faire rapidement parce qu'elle se conserve pas très bien. La Adriana est polyvalente, tu peux la consommer comme tu veux. La Elodie aussi. La Daisy se conserve très bien et peut être mangée en chips, purée et soupe. La Blanche est utilisée pour la purée et les frites. La Bleu d'Artois est très belle, c'est une patate toute bleue, de l'extérieur et de l'intérieur, qui se mange en purée, vapeur et chips. Mais je pense pas qu'il y en ait, ici... Puis la Corolle est bonne en salade. La Jeannette, c'est parfait pour les rissolées. D-du coup, je te conseille la Jeannette, la rissolée c'est bon en hiver je trouve, avec du beurre, des oignons, de l'huile et des herbes... 

Elle se tût et se mit à fixer l'étalage de Jeannettes, en songeant au fait qu'elle avait peut-être un peu trop parler. Elle pouvait causer des heures avec passion de ces fameuses pommes de terre, qu'elle avait répertorié dans un petit carnet qu'elle gardait dans le tiroir de sa commode au dortoir. Mais, vue qu'elle avait personne à qui parler en général, elle se contentait de taper la discute avec ses patates sautées et ses gratins ou des fois, avec les vendeurs au marché. 

Ryan :

Il l'écoutait dans son baratin, notant toutes ses informations dans un coin de son cerveau. Les patates avaient des noms ? Il pourrait peut-être appeler le prochain gratin qu'il ferait "Jean-Jacques" ou "Micheline". La Amandine, la Adriana, la Elodie...On aurait dit des noms de Miss France. Miss Patate 2017, ça sonnerait bien. Il sortit de ses songes quand elle mentionna..Une patate bleue? Une patate bleu ? C'était pas une modification d'ADN faite par les scientifiques ou quelque chose comme ça ? ça devait être bourré de colorants son truc...Le blondinet fit mine d'être intéressé, pensant à autre chose comme ce qu'il allait préparer ce soir où les prochains cours qu'il avait. Puis elle se tut. Elle avait quoi? 

- O-oui, et ?

Elle avait sans doute capté qu'il l'écoutait pas. Merde. Il soupira, en regardant le sol puis leva son regard vers elle.

- Désolé, j'ai pas vraiment écouté. Les patates c'est pas mon truc.

En même temps c'était le truc de qui -à part d'elle- ? Il avait jamais entendu personne dire "moi ma passion c'est les patates" ou "les bactéries génétiquement modifiables" ou des trucs du genre.

- Mais on peux continuer nos courses ensemble! 

(hahaha je suis trop d'accord pour les noms de Miss France xD)

Liseron :

Comment ? Liseron dévisageait le jeune homme sans réaction notable, avant de froncer les sourcils de consternation, quelques secondes plus tard. C'était lui qui lui demandait des conseils. Elle lui livrait ses savoirs, puis en fait, non il n'en voulait pas ? C'était une offense aux pommes de terre... 

Maussade, la jeune fille préférait regarder un point derrière le garçon dont elle ignorait toujours le nom, pour lui répondre.

- C'est une option. Et quel est ton nom ?

(I'M ALIVE ! *hallelujah*)

Ryan :

Le blondinet pris la première patate qui tomba sous sa main -une déformée, il allait l'appeler Huguette- et releva le regard sur Liseron. Liseron, ça lui disait un truc. C'était pas un nom de fleur ? Il écoutait jamais en SVT, plus intéressé par les sourcils fournis du prof, ou trop occupé à jouer avec son stylo. Il eut un semblant de sourire en entendant la question de la fanatique de patates. Elle s'intéressait à lui, donc il était sûrement plus intéressant qu'une patate.

- Moi c'est Ryan.

Voyant qu'un blanc commençait à se réinstaller, Ryan fouilla dans sa petite tête blonde pour chercher un sujet de conversations -autre que le nom des patates.

- T'as des conseils pour réussir son gratin de patate ? Je foire toujours le mien.

(YAAAAYY FINALLY <3)

Liseron :

La jeune fille ne dit rien d'abord - que pouvait-elle ; devait-elle dire à ce garçon qui venait de se présenter ? "Enchantée" ? Ca sonnait vraiment bizarre, au final les salamaleks étaient tous bizarres en soit, demander "ça va ?" alors qu'on s'en fiche et qu'on attend un "oui et toi" bateau (et surtout pas un "non" morose), dire "tu peux sortir les poubelles, s'il te plaît ?", comme si ça plaisait à quelqu'un de sortir les poubelles ! Mais le "enchanté(e)" ou "ravi(e) de faire votre connaissance !" étaient les pires. C'était trop, presque hyperbolique, parce que à priori très peu de gens ressentent tant d'entousiasme à faire la connaissance d'une personne, puisqu'on ne sait rien d'elle qui nous inspire un sentiment de joie, sauf s'il s'agit d'une star reconnue, alors là, oui c'était peut être différent.

Toujours est-il que Liseron était mal à l'aise parce qu'elle ne voulait pas mentir en disant "enchantée" mais qu'elle ne voulait pas non plus paraître snob. Elle fit donc un petit mouvement de tête qu'elle pensait significatif, toujours le regard perdu dans la vague, jusqu'à ce que... Jusqu'à ce qu'il pose sa question. Alors là, Liseron reprit du poil de la bête, et posa ses yeux (qui étaient comme vivifiés tout à coup, eux pourtant jolis mais si éteints d'ordinaire) sur l'intriguant personnage. Certes, il l'avait renfrognée pas moins d'une minute auparavant à lui dire que "les patates c'est pas son truc", mais on peut tous changer d'avis, non ? Liseron hocha de nouveau la tête, prit une petite respiration et entama le récit de sa recette miraculeuse, comme une conteuse pour enfants :

- Le secret d'un bon gratin, c'est le gratin classique comme on l'aime avec une touche de folie en plus ! L'histoire de ton gratin commence par un kilo de belles patates. Ensuite...

Et du fromage râpé (ou de la mozzarella !), et de la crème fraiche, et du beurre, et du sel, et du poivre, et du sucre roux (oui m'dame), et une pincée de paprika... 

Ryan :

Cette fois, le blond écouta -et vraiment. Durant le monologue de Patate Girl, il ne se gêna pas pour poser quelque questions qui sembleraient bêtes aux premiers abords, des trucs comme "les patates, en carré ou en rondelles" ou encore "qu'est-ce que je fais si je met trop de crème fraîche"...Comme ça pour environ vingt minutes. En soi, il appréciait bien la compagnie de Liseron : ses réactions et mimiques étaient drôles, et la passion qu'elle portait pour les patates était...unique. Mais une question se posa dans l'esprit de Ryan : si les deux venaient à être amis, est-ce qu'elle allait garder les mêmes sujets de conversation ? Ryan allait sans doute devoir lui faire un cours d'interaction sociales, histoire que ses seuls amis ne soient pas Ryan et le caissier du supermarché.

- Tu as songé à te lancer dans l'écriture d'un livre de recettes?

Si il avait énoncé l'idée, c'était plus pour qu'elle lui demande de prendre les photos pour la couverture et pouvoir enfin faire connaître son travail au monde entier -autre que par Instagram.