[MIRANDA] she's a goddess and we're in hell [terminé]

Sasha;

Selma avait le sang chaud, ses manières de princesse n'arrivaient pas à dissimuler ce fait. Alors Sasha ne fut pas étonnée lorsque la métisse lui proposa de défoncer le pauvre sèche linge qui avait mal choisi son jour pour tomber en panne. La russe tenait quand même à récupérer ses vêtements et elle craignait que donner des grands coups de pieds dans la ferraille ne rendre plus ça possible. Elle retint un petit sourire, quand même un peu amusée par la proposition de Selma.

— Bah si la méthode douce ne fonctionne pas, on pourra toujours essayer d'y foutre des coups.

Elle descendit de son perchoir pour aller poser ses fesses à même le sol, juste en face de la machine, bien curieuse de savoir comment Selma comptait s'y prendre. Elle détailla la jeune femme et son air déterminé. 

— J'veux pas mettre en doute tes compétences, tu me connais c'est pas du tout mon genre, mais tu t'y connais en sèche linge ?

Elle devait avoir prit un peu froid parce qu'elle avait fait preuve d'auto dérision. Après c'était soit ça soit "à condition que tu aies effectivement des compétences" et Sasha tenait quand même à ce que son linge soit sec.

Selma Jallab;

Si on lui avait dit que cette après-midi elle allait aider Sasha, Selma aurait éclaté de rire avant de se tirer aussi vite qu'elle était arrivée. Non mais, et puis quoi encore ? Force était de constater que c'est ce qu'il était en train de se passer. C'était toujours mieux que de s'étriper, ou de se faire emporter par la tornade. Puis, c'était pas un monstre, Selma, elle pouvait bien faire preuve d'un peu de sympathie. Oue. Non. Fallait pas abuser non plus.

Elle était pas marrante, Sasha, à choisir la méthode douce. Étrangement agacée, la djinn aurait bien eu besoin de lancer deux ou trois coups de pieds bien mérité à la machine à laver belliqueuse. Mais si Madame Zamalo...Zamoladch.. Si Madame je tire la gueule préférait la manière douce, Selma pouvait bien tenter de bidouiller.

— c'est pas mon genre de douter de mes capacités.

Une machine à laver, ça devait pas être bien plus compliqué que s'occuper d'une voiture, si ? Bon, la quête allait être plus compliqué que prévu, parce qu'elle n'avait aucun outil pour faire quoi que ce soit. Des coups pieds auraient été bien plus rapide, mais pas forcément plus efficaces.

— je suppose que t'as pas un tournevis ou un truc du genre sur toi ?

Parce que quel étudiant digne de ce nom se trimballait avec un putain de tournevis dans ses poches. Certainement pas Selma. Et peut être encore moins Sasha.

— une cuillère ?

Qui ne tentait rien n'avait rien. Alors peut être qu'une cuillère, ça, c'était dans ses cordes. En attendant, la Mauritanienne balayait la pièce du regard à la recherche d'un miracle. Hors de question qu'elle se pète un ongle pour les fringues sans aucune saveur de Sasha. Ah ça non!

Sasha;

Est-ce qu'elle s'y connaissait vraiment en laves-linge ? Et si oui, comment elle s'y connaissait ? Selma n'avait pas vraiment l'air d'être le genre de fille qui fout ses ongles manucurés au milieu de tout ce bordel. Mais après tout, Sasha la connaissait mal, Tout était possible. La preuve, elles étaient actuellement coincées au milieu d'une tempête, la mauritanienne portait les vêtements de la russe et elle venait même de lui proposer son aide. À ce stade, plus grand chose ne pouvait étonner Sasha.

Un tournevis, non, une cuillère non plus malheureusement. Elle attrapa son sac toujours posé sur la machine et l'ouvrit, plongeant sa main dans le tas d'affaires roulées en boule pour attraper sa trousse. Elle fouilla dedans quelques secondes et en sortit une petite règle en fer, qu'elle utilisait pour souligner soigneusement les titres de ses cours, détestant avoir des notes mal organisées.

Elle tendit le petit objet à Selma après avoir rangé sa trousse.

— ça, ça peut faire l'affaire ?

Sasha ne croyait pas aux miracles. Mais si la mauritanienne arrivait à démonter une machine à laver avec un reglet en fer, elle était capable de revenir sur sa position.

Selma Jallab;

Pendue à la trousse que Sasha était en train de fouiller, ses espoirs furent bien rapidement piétinés par la vision de cette petite règle en fer. Au moins, elle n'était pas en plastique, et ne risquait pas de céder sous la pression que comptait exercer Selma pour ouvrir ce terrible hublot. Qui avait eu l'idée, en premier lieu, de foutre ses fringues dans ces machines de mort ? Parce qu'elle ne pouvait pas attendre d'être rentrée à Headwinds, la très chère russe ? Ca aurait sans doute éviter à la jeune femme de se la jouer McGyver et de révéler ainsi un de ses - très nombreux - talents secrets.

— Si elle casse, c'est pas mon problème par contre. C'est tes fringues ou ta règle, pas moyen que j'sauve les deux.

Fallait pas trop lui en demander non plus: ce n'était pas parce qu'elle faisait l'insigne honneur de lui chercher ses vêtements qu'elle allait en plus lui servir maintes mièvres politesses, ou qu'elle allait en avoir quoi que ce soit à faire de sa pauvre règle de malheur.

— Maintenant, tu te tais, et tu laisses faire le maitre.

Observant avec une attention toute particulière le hublot, elle avait finit par placer stratégiquement le petit bout de fer entre ses ongles parfaitement peignés entre le châssis et la porte. Avec un peu de chance, et de force, un ou deux coups suffiraient à enclencher le système qui leur permettrait alors de surmonter cet évènement traumatisant. Pas la tempête qui faisait toujours rage, mais plutôt l'effort de gentillesse que chacune avait fait envers l'autre. Heureusement qu'il n'y avait qu'elles, dans cette pièce. Pas de témoin gênant à éliminer.

— Putain de sa mère.

Et Selma avait mis toutes ses forces dans l'entreprise, ce qui venait de lui couter un ongle, et un bout de son doigt qui venait de glisser sur le rebord de la règle, et qui venait de légèrement s'ouvrir. En écho, un grand bruit s'était fait entendre: le hublot s'ouvrait enfin. Grommelant dans sa barbe qu'on ne lui reprendrait plus à deux fois, elle s'était empressée d’ausculter son pauvre doigt, et le faux ongle qui gisait non loin. Ils avaient tenu deux jours. C'était d'un ridicule.

— T'en parles à personne, c'est clair ?

Selma s'était alors fait menaçante, en fusillant du regard Sasha, histoire de l'impressionner avec tout le charisme qu'elle pouvait puiser à cet instant, à deux doigts de piquer une crise pour les désagréments que lui avait couté sa trop rare gentillesse.

Sasha;

C'est ainsi qu'elle se prépara à faire le deuil de sa si fidèle règle en fer. Deuil qui fut bien vite fait, Sasha n'était pas bien matérialiste de toute manière et préférait ça au fait de devoir potentiellement se trainer dans les magasins pour remplacer les vêtements coincés dans le tambour de la machine capricieuse que Selma s'apprêtait à achever.

Elle haussa les épaules, ne comptant pas commenter chaque geste de la mauritanienne de toute manière. Elle se recula jusqu'à être adossée au mur, toujours les fesses par terre, aux premières loges de l'affrontement qui se préparait.

Affrontement qui fut bien vite réglé, le hublot s'ouvrit finalement, l'index de sa camarade aussi et Sasha ne put s'empêcher froncer les sourcils, pas bien à l'aise à la vue de l'entaille et du liquide rougeâtre qui y perlait déjà. Elle se garda bien de faire une quelconque remarque et se leva, attrapant de nouveau son sac. Plongeant la main au fond de la poche avant, elle en sortit du gel hydroalcolique, un paquet de mouchoirs et des pansements. 

— Zut, j'comptais aller voir des gens à qui je parle pas du tout d'habitude pour me vanter que tu t'es fait mal par ma faute, répondit t'elle avec ironie en versant du gel sur un mouchoir avant de le tendre à la brune avec la boite de pansements. 

Savoir que, dans un sens, elle lui était redevable l'embêtait un peu. Même si, au fond, la mauritanienne pouvait parfois montrer une once de légère sympathie, la russe préférait rester loin d'elle. Là elle avait l'impression de lui devoir quelque chose pour la remercier d'avoir sauver ses fringues qu'elle s'empressa d'ailleurs de plier et de mettre dans des sacs plastique.

C'était le moment ou elle devait dire merci. Et ça lui arrachait un peu la langue mais elle n'était pas malpolie non plus. Elle se racla la gorge et les mots sortirent de sa bouche de manière pas bien naturelle. 

— Merci, d'ailleurs... Pour euh... ton sacrifice.

Elle jeta un coup d'oeil au faux ongle tombé au combat.

Selma Jallab;

Assise par terre, aux côtés de la machine qui venait de céder à ses talents de bricole, Selma avait laissé le champ libre à sa camarade pour récupérer ses foutus vêtements qui s'étaient bien gentiment coincés dans le tambour. Elle espérait aussi qu'il n'y ai pas de caméras, histoire de ne pas avoir de problème avec son petit tour de passe-passe. Observant avec attention son pauvre doigt meurtris sur lequel elle avait appliqué le mouchoir et le gel qu'on lui avait si gentiment tendu, elle maugréait, et maudissait l'homme qui avait inventé ces merdes. Parce qu'il fallait bien que ce soit un homme, non, pour que ce soit aussi pourri et si peu ergonomique.

— J'ai toujours su que t'étais du genre à raconter tout et n'importe quoi à n'importe qui de toute façon.

Elle avait lancé ça sous le coup de la plaisanterie cinglante, comme elle en avait si bien l'habitude. C'était triste, de ne parler à personne. Selma ne comprenait pas bien, elle qui aimait particulièrement la présence de ses amis, quand bien même elle était particulièrement insupportable et ne gardait que très peu de temps les nouvelles connaissances qu'elle se faisait. Mais c'était à prendre où à laisser, et quand on passait ce vernis irritant se révélait un tableau plus flatteur. Peut-être même admirable, entre dévotion et ambition.

Tableau qu'elle se garderait bien de révéler à Sasha, qui s'empressait de ranger ses vêtements, avant qu'un nouveau drame n'arrive. Un truc plus grave que la tempête qui faisait rage dehors et qui les avaient forcé à se retrouver dans la même pièce.

— J'me sentais d'humeur généreuse, pas b'soin de me remercier.

Un sourire plein de fierté s'était posé sur ses lèvres, en entendant le mal avec lequel la russe venait de la remercier. Pourtant, ils avaient trouver leur place dans son coeur, ses remerciements, quand bien même il ne s'agissait là que de politesse: ça avait l'air de lui arracher le coeur, et pas que, alors ça devait bien avoir un sens un peu plus profond. Selma n'était pas un monstre, non plus, et savait apprécier les efforts à leur juste valeur.

Ca ne l'avait pourtant pas empêcher de suggérer très fortement à Sasha de la laisser tranquille, désormais, jusqu'à ce que la tempête se calme et qu'elle puisse prendre ses jambes à son coup. On n'était jamais trop prudent: Selma aurait pu perdre un autre ongle, ou pire, se montrer une nouvelle fois agréable et gentille envers elle. Chose qui était bien entendu impensable.