• I was sad last night but I’m ok now [fermé]


    Samedi 22 Mai 2021 à 12:23
    Cafevy

    Sémélée Vasillis;

    Si la tempête n'était plus qu'une esquisse de mauvais souvenir, que des nuages sombres au milieu d'un ciel si bleu qu'elle tentait tant bien que mal de faire disparaitre, le festival, lui, était encore assez frais dans sa mémoire pour la troubler tout autant que la fin de cette soirée. Cela faisait quelques jours qu'elle avait gardé, bien précieusement, le béret qu'on avait déposé sur sa chevelure, et qu'on avait malencontreusement oublié, appelé par un devoir que le professeur n'aurait su refuser. Quand, au fond, Sémélée, aurait sans doute préféré être un peu plus intéressante qu'un simple karaoké. Cette idée n'avait d'ailleurs pas eu ni la décence, ni le respect, de bien vouloir la laisser vivre en paix, préférant s'insinuer insidieusement dans son esprit à chaque petite divagation causée par un trouble toujours constant. Les cours avaient été bien long, elle qui d'habitude ne perdait pas une miette du savoir qu'on voulait bien lui enseigner, lui partager. Elle préférait se perdre, quelques instants, sur les grands fenêtres des amphithéâtres qui laissaient la lumière des beaux jours filtrer et s'écraser sur sa peau verdâtre qui n'aurait jamais su refuser leur délectable présence.

    A courir un peu partout, après les cours, après les devoirs, et surtout après le temps, Sémélée n'avait trouvé de répit pour rendre le couvre-chef à son propriétaire, entre ses horaires d'étudiantes et ceux de professeur de Lancelot. Puis, il y avait bien Beau, qui la trainait un peu partout depuis l'arrivée des beaux jours, et Hershell qui n'en manquait pas une. Séléné, aussi, avec qui elle plantait des fleurs aux heures du club de jardinage. Et pas que. Incapable de refuser la moindre sollicitation, c'était pourtant bien celle d'un certain jeune homme qui lui manquait tout particulièrement. Et elle se détestait pour penser de la sorte.

    Cela ne l'avait pas empêcher, un jour d'accalmie, de prendre son courage à deux mains, et le béret, pour se diriger vers la salle qu'occupait ce dernier. En espérant qu'il n'ai pas changé de classe depuis ses propres cours, histoire de ne pas avoir à s'expliquer en attendant comme une idiote devant la porte que la leçon se termine pour s'engouffrer à contre courant, entre les lycéens bien content d'avoir un moment pour souffler.

    C'était ainsi que Sémélée attendait, devant la porte, tendant l'oreille dans l'espoir un peu vain de capter quelques bribes de parole, quand son regard n'aurait su lâcher plus de deux ou trois secondes l'horloge qui tronait au milieu du couloir: si c'était bien du temps, qui lui manquait, et qui s'échappait à une vitesse affolante d'entre ses doigts, les minutes qui suivaient en parurent des heures. Mais quand elle avait cru sonner l'heure de la délivrance, son coeur repris son rythme effréné, battant tambour, en observant les premiers élèves extatiques quitter les lieux.

    Elle avait attendu que la foule se décante, qu'il ne reste plus que quelques réfractaires, quelques élèves un peu plus lent que les autres, ou moins pressé de prendre leurs jambes à leur cou, qui rangeaient encore leurs affaires avant de disparaitre. Elle avait d'ailleurs fait partie de ces élèves, Sémélée, de ceux qui prennent leur temps, sans vouloir faire perdre celui de leurs professeurs. Pendant un long moment, les salles de classes comblaient l'absence de ses parents et de la campagne grecque. Il n'y avait rien d'étonnant à ce qu'elles les aiment autant.

    A pas de loups, elle s'était approchée du bureau, les mains bien accrochés sur son sac qui contenaient encore quelques livres, et la propriété de Lancelot.

    — Excuses-moi, est-ce que je te déranges, avait-elle demandé d'une douce voix, se demandant s'il était bien avisé de tutoyer l'homme dans sa salle.

    Ils n'étaient plus élève et professeur, certes, mais la jeune pousse ne voulait pas le mettre mal à l'aise devant ses propres élèves. Elle s'en serait probablement voulue. Et encore un peu plus s'il l'avait mal pris.

    Samedi 22 Mai 2021 à 17:53
    Upside

    Lancelot Louis Bastien de la Fromagère:

    La soirée qu'il avait passée en compagnie de Sémélée tournait en boucle dans son esprit depuis qu'il l'avait quittée, elle et ses histoires célestes, pour chanter avec Marcel. Non pas qu'il n'ait pas apprécié la compagnie de son collègue, mais il aurait volontiers préféré continuer à passer du temps à ses côtés. Il se surprenait parfois à penser à elle, plus souvent que d'habitude. Le coeur à la fois si léger de bonheur mais si lourd en sentiments. Les seules fois où il arrivait à se concentrer sur autre chose, c'était en cours. Les lycéens dont il était le professeur savaient comme occuper son esprit un peu trop bien.

    Il avait reçu pas mal de commentaires amusés, en plus de questions curieuses, de la part de ses élèves qui l'avaient vu avec sa marinière, son petit foulard rouge et son béret très français. Son béret. Béret qu'il n'avait d'ailleurs pas récupéré. Il avait mis quelques jours avant de réaliser qu'il l'avait oublié sur la petite tête d'une ravissante femme plante. Mince! Il avait cherché toute la semaine un moment pour aller la trouver, mais il n'avait eu une seconde de répit pour parcourir les amphithéâtres à la recherche de l'endroit où elle aurait pu avoir cours. Entre les copies à corriger, les séances à préparer et les exposés que certaines classes avaient à commencer, le temps libre savait se faire désirer.

    Ce jour-là était un jour comme un autre. Ses élèves étaient plutôt sympathiques en général et il était soulagé de constater au fil des années que les classes difficiles étaient des cas rares dans cet établissement. Audacieux et parfois insolents, mais jamais méchants, du moins pas dans sa salle de classe. La cloche venait de sonner l'heure de la pause et il attendait que les derniers élèves plient bagage pour fermer la salle. Il avait besoin de se chercher une recharge de chocolat chaud, il voyait malheureusement déjà le fond de sa thermos. Il observait ses loustiques de seconde qui aimaient bien traîner, tout en plaisantant un peu avec eux.

    - Vous allez louper la récré, faites attention! .. Si vous voulez je ferme la porte et je reviens vous chercher après?

    Ils avaient fait des yeux ronds, ils savaient que M. de la Fromagère plaisantait, mais qui sait, peut-être un jour ça allait vraiment arriver?

    Il entre-aperçut une silhouette s'approcher de son bureau tandis qu'il rangeait ses pochettes. Il tourna la tête et reconnut les doux traits de cette personne qu'il commençait à bien connaître. Sa façade de professeur se décomposa un peu alors qu'un sourire presque timide naissait sur son visage. C'était Sémélée qui se tenait près de lui, lui demandant doucement si elle le dérangeait.

    - Pas du tout! Lança-t-il sur un ton un peu plus enjoué que ce qu'il pensait.

    Il n'aurait jamais cru qu'elle viendrait le voir dans sa salle et qu'elle se tiendrait face à lui. Il devait s'admettre qu'elle avait peuplé beaucoup de ses pensées ces derniers jours, surtout qu'il espérait éventuellement récupérer son béret.

    - Qu'est-ce qui t'amènes par ici? Demanda-t-il curieux de la raison de sa venue jusqu'ici.

    Samedi 22 Mai 2021 à 20:56
    Cafevy

    Sémélée Vasillis;

    Quelques élèves assidus semblaient réfractaires à l'idée de profiter de leur pause pour rejoindre des camarades qui devaient sans doute les attendre pour prendre leur repas. C'était du moins la théorie que c'était fait la jeune femme, pas franchement habituée aux amitiés nombreuses, quand la personne la plus proche d'elle n'était autre que Beau, qu'elle connaissait depuis déjà un bon nombres d'années. Avant même d'entrer à Headwinds. Hershell, lui, c'était fait désiré, quand l'attente valait, selon elle, largement le coup. Car s'il était certes un peu excentrique et du genre à courir un peu partout, son amie le trouvait d'un naturel tout à fait charmant et même plutôt amusant. Très aimable, aussi, et d'un soutien qui se révèlerait sans doute sans faille. Comme l'inverse était tout aussi vrai. Réciproque, même. C'était bien ainsi que fonctionnait les amitiés les plus solides, n'est-ce pas ?

    Amusée par le semblant de menace que venait de tenir le professeur, un léger rire lui avait échappé, quand elle aurait préféré rester discrète un peu plus longtemps, pour au moins ne pas trop se faire remarquer par les élèves encore dans la salle. Du moins, plus que de raison, quand il était difficile de passer à côté d'un spécimen comme Sémélée. Non pas qu'elle fasse preuve de quelconque vanité, quand on ne tarissait pas d'éloge de là où elle venait (sa famille, surtout), mais plutôt qu'une jeune femme à la peau verte, il n'y en avait pas beaucoup, dans le coin. Presque pas même, si ce n'était pour dire aucune pour le moment.

    Attendant qu'on lui laisse la possibilité de s'exprimer, elle s'était glissée un peu plus près de Lancelot, pour entrer entièrement dans son champ de vision: c'était bien plus agréable pour parler. L'espace de quelques secondes, il avait arboré une bien étrange expression qui la troubla, presque autant qu'il devait l'être. Leur proximité, au grand jour, la rendait un peu plus nerveuse, un peu plus honteuse des battements de son coeur qui ne faisait que s'emballer quand il posait ses yeux sur elle. C'était ridicule, c'était enfantin, et pourtant, jamais elle n'avait connu une sensation plus pesante et plaisante. Elle avait peut-être pris un coup de lune, à cette soirée. Un sacré coup, même, qui était pourtant tout à fait agréable. Le genre de coup qui ne laissait pas de bleus, mais que de bon souvenirs quoique parfois un peu douloureux.

    Raide comme la justice, elle était restée face au professeur, relevant un peu la tête pour pouvoir le regarder avec un peu plus d'aisance, un sourire pointant timidement le bout de son nez sur ses lèvres. Lui aussi, n'avait eu de cesse de la tourmenter, et d'occuper la moindre de ses pensées un peu trop fugace.

    — Ce qui m'amène ici ?

    La question semblait idiote de simplicité, pourtant, la réponse, Sémélée ne l'avait pas. Du moins, pas sur le champ. Elle avait perdu le fil de sa pensée, il lui avait fait perdre le fil de sa pensée, quand elle s'était répétée à chaque pas qui la rapprochait de la salle de classe ce qu'elle aurait pu lui dire. Ce qu'elle aurait voulu lui dire. Et voilà que, face à Lancelot, les mots lui manquaient. Le courage, aussi, d'avouer des choses qui ne l'étaient pas, et dont elle n'était même pas sûre de la signification.

    — Je voulais simplement savoir comment est-ce que ça allait pour toi, depuis le festival. Si le karaoké c'était bien passé. Ce genre de choses.

    Sémélée, elle, était restée sur l'herbe, les joues rouges et le ventre plein de papillons, avant de s'engouffrer jusqu'à son dortoir, pas franchement à l'aise à l'idée de retourner dans la foule, et d'avoir à affronter la foule d'étudiants. Puis, si le karaoké était un sujet de discussion tout à fait frivole, la réponse intéressait sincèrement la jeune plante.

    Lancelot aurait pu lui parler de tout et n'importe quoi, elle se serait perdue dans le flot de ses mots, dans le fond de ses yeux.

    Jeudi 27 Mai 2021 à 21:47
    Upside

    Lancelot Louis Bastien de la Fromagère:

    Il ne faisait pas spécialement clair en cette journée, le soleil semblait peiner à passer entre les rideaux pour éclairer la salle de classe où il semblait faire bien triste. Mais depuis l'entrée de Sémélé, tout était devenu plus clair, un rayon de soleil entre les nuages gris, une touche de couleur dans l'ambiance morne de la pièce. Il aurait pu laisser son regard dessiner chacun des traits de la jeune femme comme pour les garder dans son esprit, ne pas oublier ce visage radieux.

    Le professeur qui avait pourtant si hâte de profiter de la pause était à présent figé derrière son bureau. Au diable la pause, au diable sa thermos de chocolat chaud! Plus rien n'avait vraiment d'importance. Même pas les élèves encore coincés au fond de la salle, aplatis sur leurs chaise, n'osant se faufiler dans le couloirs, visiblement trop absorbés par la scène qui se dévoilait sous leurs yeux.

    Son regard se posa doucement sur les lèvres de la jeune femme, buvant ses mots, pendu à son sourire qui avait su trouver ce petit chemin jusqu'à son coeur, ouvrant la porte de son myocarde avec une facilité déconcertante. Une chaleur étrange remonta le long de sa nuque, se hasardant peut-être déposer quelques rougeurs sur le coin de ses joues tandis que ses yeux bleus cheminèrent timidement jusqu'à ceux de son interlocutrice.

    Elle était simplement venue pour s'enquérir à son propos, de quelques banalités, le coeur de Lancelot se serra. Il n'était pas bien brave, le chevalier à la charrette. Il suffisait qu'une déesse aux boucles rousses croise son regard sur le chemin pour qu'il perde ses moyens. Il n'aurait pas fait long feu dans n'importe quelle quête moyenâgeuse, le bon Lancelot. Les mots s'entrelaçaient dangereusement dans ses pensées. Elle n'était pas venue dans un but particulier, était-ce prétentieux de sa part d'oser imaginer qu'elle était là pour.. lui?

    Des bourgeons s'étaient enroulés entre ses tripes, les fleurs qui en naissaient le chatouillait et qui sait quand les papillons se risqueront à virevolter dans les champs de son esprit, effleurant les pans de ses pensées. Sémélé y avait laissé entré le printemps. Et au fond de lui, il espérait peut-être qu'elle serait son été, son soleil et son ciel bleu.

    Lancelot reprit ses esprits, se reconstruisant une contenance, cachant le trouble qui arpentait sinueusement sa voix.

    - Oh, le karaoké, eh bien, il s'est plutôt bien passé. Marcel a su s'emparer de la scène, c'était lui la vraie vedette de la soirée. Dit-il d'un petit rire.

    Il eut un sourire timide en repensant au ridicule pourtant amusant de cette fin de festival. Il espérait secrètement que Sémélé n'ait pas assisté à ça. Il passa une main dans ses cheveux, dégageant un peu les mèches sombre qui étaient tombées sur son front quand il se rappela que la demoiselle avait gardé son béret!

    - Ah! Tant que j'y pense! Est-ce que tu aurais le béret que je portais cette soirée là? Je crois que j'ai oublié de l'emporter lorsque je suis parti honorer la promesse!

    "Oublier", peut-être qu’intrinsèquement, il avait besoin d'une excuse pour la revoir. Une excuse qui avait bien marché. Béret qui lui allait si bien qu'il n'avait pas pensé une seule seconde à le récupérer.

    Jeudi 27 Mai 2021 à 22:47
    Cafevy

    Sémélée Vasillis;

    L'atmosphère pesante et lourde des derniers jours s'étaient teints d'une douceur exquise, quand quelques effluves d'amour caressaient doucement les pourtours de son cœur. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas battu avec autant de force, autant de conviction, il battait si fort qu'elle en avait mal, dans sa poitrine, et qu'un poids aussi lourd que plume la pressait toujours un peu plus, à chaque seconde qui passait. Le cliquetis incessant des horloges qu'elle avait toujours maudits pendant ses longues heures de courts n'avait su se faire une place dans son cœur, à défaut de certains. Il lui avait fallu deux longues années avant qu'il ne se ranime, quand la peur mordait toujours sa peau de ses crocs acérés: et si elle n'était pas assez bien pour ce genre de choses, si elle ne le méritait pas, s'il n'était pas intéressé. Elle trouvait d'ailleurs l'idée d'imaginer le professeur en face d'elle intéressé par son cas un mensonge grossier de son esprit qui n'avait fait que fantasmer quelques scénarios improbables qui la tenaient éveillée de longues minutes durant la nuit. Et qui la réveillait parfois, honteuse de s'être laissé avoir. Comme si l'on avait pu lire en elle comme dans un livre ouvre, dans sa chambre, plongée dans le noir, quand l'air frais des nuits de printemps frappaient sa peau frissonnante.

    Les mains jointes, dans son dos, elle se balançait nerveusement, d'avant en arrière, sur ses pieds, comme une adolescente frappée par les premiers bourgeons d'amours enfantins, de ceux que l'on croit éternels et qui pourtant se meurent en hiver, gelés par le froid des années, fondant sous les flammes d'autres passions embrasées. Sémélée ne s'était toujours pas avouée l'intérêt qu'elle lui portait, stupides sentiments qui la prenait bien trop souvent quand on lui souriait dans la rue, quand on lui faisait un compliment, ou qu'on frôlait sa main. Mais là, tout était différent. Comme à chaque fois. Il était différent.

    Elle aussi avait oublié la présence de quelques élèves prostrés au fond de la scène, pendu à la scène surréaliste qui se déroulait devant leurs yeux, comme Lancelot était pendu à ses lèvres, à ses mots. Sémélée, elle, aurait sans doute préféré se pendre à son cou, sans réussir à donner un sens au flot de pensée fluettes qui ondulaient dans son esprit. Des choses, elle aurait pu en faire. Des mots, elle aurait pu en dire. Et pourtant, rien ne semblait sortir. Rien ne semblait coller à la perfection à ce qu'elle ressentait.

    Marcel a su s'emparer de la scène, c'était lui la vraie vedette de la soirée

    La jeune plante n'aurait jamais douté de la prestation du professeur de géographie quand sa soirée, elle, n'avait été animée que d'une seule présence qui en avait chassé toutes les autres. Elle qui aimait tout particulièrement apercevoir les étoiles dans les nuits printanières les trouvaient bien fades, bien ternes, depuis le festival.

    Est-ce que tu aurais le béret que je portais cette soirée là? Je crois que j'ai oublié de l'emporter lorsque je suis parti honorer la promesse!

    Cette promesse qui était tombée à pic, Sémélée la maudissait, comme elle maudissait d'avoir plongé un peu trop longtemps ses yeux dans l'océan qui se présentait devant elle: deux secondes de plus et la jeune femme se serait sans aucun doute noyée dans l'immensité de ceux du chevalier.

    — Oh, le béret, oui ! J'étais venue te le rendre, en passant, soupirait-elle en fouillant nerveusement dans son sac.

    Et une idée avait frappé, intimé par un élan effronté qu'elle finirait par regretter. Seulement pour quelques minutes.

    Sortant le couvre-chef de son sac qu'elle avait pris soin de ne pas froissé, la belle plante avait fait deux pas en avant, acculant le pauvre professeur à son bureau qui n'avait plus aucune porte de sortie. Et, se hissant sur la pointe de ses pieds, elle s'était autorisée à déposer avec douceur le béret sur les cheveux un peu moins soignés du professeur, un léger sourire sur le coin des lèvres.

    La décence l'empêchant toute franche ardeur, ses lèvres carmins s'étaient seulement sinueusement dirigée vers la joue rosie de Lancelot pour s'y glisser quelques secondes. Sa main, elle, avait fini par retomber, presque surprise de l'entreprise éhonté de sa propriétaire, effleurant dans sa course la joue qu'elle n'avait pas assailli.

    — Merci, pour la soirée.

    Le cœur battant tambour, son souffle s'était écrasé contre la peau du professeur quand elle avait jugé bon d'esquisser quelques maigres remerciements qu'elle n'avait pas jugé très convaincant. Sémélée aurait préféré un peu plus d'emportement, d’excentricité, de profondeur, quand tout ce qu'elle avait trouvé a dire était bien pauvre face à l'immensité des champs qu'il avait réussi à faire fleurir dans sa tête, et surtout, dans son cœur.

    Mais, comme frappée par le ridicule de son geste, et la peur de s'être emportée, l'étudiante était bien vite revenue sur terre. Du balai, les fleurs, les bourgeons, les papillons, c'était un immense tourbillon dévasant tout sur son passage qui s'était saisi d'elle et du moindre de ses mouvements.

    Alors, esquissant un maigre sourire un peu honteux, elle avait pris ses jambes à son cou, les joues écarlates, tiraillé entre l'envie d'exploser de joie, et celle de disparaitre à tout jamais.

    Il fallait qu'elle en parle. Vite. Et la personne était toute trouvée: Hershell. Lui saurait quoi faire, à coup sûr.

    Mardi 1er Juin 2021 à 13:20
    Upside

    Lancelot Louis Bastien de la Fromagère:

    Est-ce que c'était égoïste de sa part de souhaiter que ce bref moment ne rencontre pas de fin? Il ne pouvait pas dévier ses yeux des iris vert de la fleur qui se tenait devant lui, plongeant tête baissée dans cette couleur prairie. Son pouls s'emballait, chaque battement de coeur résonnait dans ses oreilles sans qu'il ne puisse rien faire. Lancelot était en proie à ses sentiments qui avaient fini de fleurir. Se sentant à la fois lourd et léger, une sensation indescriptible lui chatouillait le ventre.

    Sémélé sortit le fameux béret avec beaucoup de délicatesse, oublié dans la hâte, quelques jours plus tôt, sur la tête de la jeune femme. Elle fit un pas vers lui, et le voilà qui ne pouvait plus filer. Même si pour rien au monde il aurait essayé de s'échapper, chérissant inconsciemment cette proximité toute nouvelle qu'elle venait de créer entre eux, proximité qu'il se surprit brièvement à vouloir combler. Elle se hissa sur la pointe de ses pieds, réduisant encore un peu plus la distance qui les séparait.

    Les yeux du professeur ne pouvait s'empêcher de trahir toute l'affection qu'il avait à son égard, ils criaient cette tendresse transie qu'il n'avait pas encore réussi à s'avouer. Il n'arriva pas à cacher ce début de sourire de s'étirer discrètement, un peu béat. Elle déposa d'un geste élégant le couvre-chef sur ses cheveux noirs, son coeur s'emballa, tapant un peu plus fort dans sa cage thoracique. Il espérait secrètement qu'elle ne l'entende pas, que le silence de la salle ne révèle pas le boucan qui avait lieu entre ses côtes.

    Il savourait les quelques instants qui lui était offert, tout près d'elle, désirant ardemment pouvoir la sentir si près de lui à nouveau. Mais la douce se montra d'une hardiesse à laquelle le professeur ne s'attendit pas, sa peau frissonna lorsque les lèvres s'osèrent à déposer un doux baiser sur sa joue, effleurant l'autre de sa main. Son coeur rata un battement. Un vertige, il était fébrile. Un frémissement fila le long de sa colonne, ébloui.

    Et elle fila, la femme fleur. Le remerciant pour la soirée. Il était sans-voix, pas certain de ce qu'il venait de se passer. Il avait rêvé? Il dût se poser contre son bureau, les jambes un peu flageolantes, le rouge lui montant inéluctablement aux joues. Heureusement qu'elle s'était sauvée, la douce Sémélé, et qu'elle ne le voyait pas dans cet état. Il porta sa main à la joue victime du baiser qu'elle avait osé y déposer.

    Il ne s'était pas risqué à y penser jusqu'à maintenant, mais là, il n'y avait plus l'ombre d'un doute, ça tournait en boucle dans sa tête sans qu'il puisse s'en soustraire. Lancelot était amoureux.

    Le regard jusqu'alors rivé sur ses pieds, il leva les yeux et aperçut les deux élèves qui n'étaient toujours pas sortis, prostrés sur leur chaise, au fond de la salle. Ils le regardaient, les yeux ronds comme des soucoupes, pas vraiment sûrs eux non plus de ce dont ils venaient d'être témoins.

    - Qu'est-ce que vous faites encore là?

    L'un deux ouvrit dans la bouche et fut arrêté par le doigt que Lancelot avait pointé vers la porte. Il se était embarrassé à l'idée que quelqu'un l'ait vu en train de s'égarer parmi ses sentiments.

    - Zou, filez sinon je vais vraiment vous enfermer!

    Ni d'une, ni deux, cette fois ils ne se firent pas prier et détalèrent comme des lapins. Une fois seul, pour de vrai, il enfouit son visage entre ses mains, l'esprit troublé, repassant en boucle ce qui venait de se passer. Lancelot n'était pas amoureux, non. Il était fou amoureux.




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