je flottais les bras en croix avec au-dessus de moi le soleil pour pénitence [fermé]

Thérèse Sherman;

La tempête n'était plus qu'un très mauvais souvenir dans l'esprit des pensionnaires. Comme la cuite que s'était prise Thérèse. L'été était à son apogée, la chaleur aussi. Le soleil culminant narguait de ses rayons brulants le moindre intrépide. La vie était réduite à un cache-cache constant entre les ombres passagères et les brins d'airs absents. Thérèse était habituée aux températures estivales, mais cela ne voulait pas pourtant dire qu'elle les supportait.  Elle passait alors  le plus clair de ses journées affalées sur son lit, limitant chacun de ses mouvements au strict minimum et ne sortait que lorsqu'on lui proposait gentiment. Un rapide tour à la piscine municipale l'avait complétement dissuadée de sortir, bondée par des familles et leurs chiards infernaux. Elle avait déjà planifié son enterrement, pas tout à fait sur de survivre à cette quasi-canicule. La piscine du pensionnat n'en était pas moins remplis par les étudiants plus vifs que Thérèse et qui l'avait prise d'assaut dès le début du mois.

C'est alors que Ray vient une nouvelle fois à son secours et la sauva d'une mort certaine. Une journée de plus à procrastiner c'était alors transformée en une petite après-midi à la gravière en bonne compagnie. Qu'est-ce qu'elle aurait fait, Thérèse, sans Ray, franchement. Sans trop d'engouement elle s'était préparé, elle et son sac. Malgré la joie que ce faisait la jeune femme de profiter d'une baignade bien méritée, la chaleur écrasante empêchait les effusions d'allégresses.

Il leur avait fallut un peu plus d'une heure pour enfin parvenir à leur but, une attente interminable qui ne rendait la redécouverte des lieux que plus merveilleuse encore. Thérèse aux yeux pétillants, il lui en avait fallut de la volonté pour ne pas se jeter corps et âme dans l'eau encore assez fraiche qui se tenait devant elle. C'était un véritable petit coin de paradis.

— j'ai cru mourir dans ma chambre! tu viens de me sauver la vie, annonça-t-elle à Ray un sourire aux lèvres.

Ray Edwards;

Il y avait tout un tas de trucs que Ray ne supportait pas; le lait cru, les blagues sexistes, le mot "morve", les mites et la transpiration de manière générale. Et là, Ray suait tellement qu'il aurait pu remplir des bouteilles. C'était pas très glamour et ça cassait un peu le mythe mais tant pis, il fallait bien l'avouer, l'oiseau crevait de chaud. Alors, après une douche tiède —pas glacée parce que le blond était incapable de prendre des douches froides et ne savait pas comment les gens faisaient pour le faire, il avait appelé Thérèse.

Peut-être qu'elle ne s'en souvenait plus mais, quelques jours auparavant, c'était elle qui avait suggéré l'idée d'aller se baigner, lorsqu'ils s'étaient retrouvés tout les deux sur le sol de sa chambre alors qu'elle était bourrée. Bon, elle avait proposé d'aller à la piscine mais les bassins bondés, les gens qui hurlent et les pédiluves dégueulasses, non merci. La gravière était bien plus calme alors, après une réponse positive de la part de sa camarade et une heure de trajet, ils étaient là, pieds nus sur les cailloux brulants.

— j'suis toujours là pour aider les demoiselles en détresse, plaisanta t-il en faisant glisser son sac de sport de son épaule.

Il attrapa sa serviette, et, ne me demandez pas comment, enleva son t-shirt pour se retrouver en short de bain rouge, assorti à ses plumes. Quel sens du détail !

Il trépignait, mourant d'envie d'aller dans l'eau, comme un gosse, mais préférait attendre Thérèse avant d'y aller.

Thérèse Sherman;

Avec étonnement, ils avaient trouvés une gravière raisonnablement accostée. Et grâce à la chance, ils avaient pu s'installer dans un coin plutôt tranquille, au plus grand bonheur de Thérèse. S'ils avaient fuit avec ferveur les piscines bondés, ce n'était pas pour se retrouver noyé sous une horde de touristes et d'habitués. Elle ne se rappelait que trop bien les vacances en famille sur des plages inondées, les enfants avec leurs châteaux de sables et les planches de surfs qu'il fallait esquiver si l'on ne voulait pas finir dans les abysses. Franchement, Ray avait eu une bonne idée.

— j'vais peut être me noyer alors.

Il y avait très peu de chance que Thérèse arrive à couler, pas très grande, le niveau de l'eau n'était pas mirobolant et il aurait fallut toute la mauvaise volonté du monde pour qu'un drame arrive. Mais si c'était pour être sauvé par Ray, Thérèse pouvait faire des exceptions.

Au vu de l'impatience certaine de ce dernier, la jeune femme se décida a enlever sa robe pour révéler son maillot de bain made in Sherman, capable de toujours plus d'excentricité à chaque nouvelle rencontre. C'était de famille, que voulez-vous, Thérèse avait simplement tiré la balle gothic pendant que ses parents se tiraient l'étiquette hippie. Elle lança nonchalamment sa robe sur les galets avant d'attacher ses cheveux et de se retourner vers Ray.

— tu fais ce que tu veux mais moi j'attends pas plus longtemps.

Ses pieds commençaient à sévèrement la bruler, on avait pas idée, de faire des cailloux si chaud. En petites foulées, elle regagna l'eau. C'était un véritablement soulagement. Le soleil avait tellement tapé sur sa peau que le contact de l'eau sur ses chevilles était une délivrance. Bien loin des conseils de sa grand-mère, ceux qui prescrivait de se mouiller la nuque avant d'entrer dans l'eau pour éviter une hydrocution, Thérèse s'enfonça jusqu'à avoir les mollets totalement immergés. Perchés sur ses jambes, elle plissait les yeux, éblouis par le soleil, ses lunettes gisant aux côtés de sa robe.

Ray Edwards;

L'ainé Edwards détailla avec émerveillement et sans grande discrétion le maillot de bain de Thérèse. C'était elle tout craché, ça lui allait bien. Haussant simplement les épaules à sa remarque sur la noyade, il se dirigea vers l'eau en trottinant, serrant les dents: le seul inconvénient d'une gravière, c'était les graviers. 

Au pire si effectivement elle se noyait, ça serait l'occasion pour Ray de montrer à quel point il était fort et vigoureux. Il lui avait déjà prouvé qu'il était super intelligent grâce aux cours de français et super attentionné grâce à l'épisode de la fin de soirée, il ne manquait plus grand chose pour qu'elle tombe sous son charme. C'était certain.

Il trempa son pied pour prendre la température de l'eau. Elle était fraiche, mais pas autant que sa camarade qui pataugeait déjà quelques mètres plus loin. En s'efforçant de ne pas jurer au contact des petits cailloux sous sa voute plantaire, il couru dans l'eau, sa progression s'accompagnant de grandes éclaboussures. Il passa devant Thérèse, ne manquant pas de lui envoyer de l'eau dessus au passage.

Dans sa tête, il était une version testostéronée de Pamela Anderson dans alerte à Malibu. En vrai, on aurait plus dit une mouette qui essayait de marcher sur l'eau mais ne gâchons pas ses rêves et passons ça sous silence.

— Je t'éblouis ? J'comprends j'fais souvent cet effet là-aaaaah

Comme si la nature lui avait ordonné de fermer sa gueule, il glissa sur une pierre et tomba en arrière dans un grand plouf.

Thérèse Sherman;

Sa progression fut stoppé lorsqu'elle se retourna pour apercevoir Ray rentrer à son tour dans l'eau avec une délicatesse proche de celle d'une éléphant dans un magasin de porcelaine. Le spectacle qui se déroulait devant ses yeux la laissait incrédule, incapable de comprendre à quoi jouer Ray. Enfin si, elle en avait bien une petite idée. Pas avare en démonstrations, il avait sans doute tenter de faire bonne impression dans un simulacre qui la laissait sceptique. Entre les rêves et la réalité, il y avait un monde, et le jeune oiseau en semblait la parfaite incarnation. C'était tout de même assez pour que Thérèse glousse avant de se sentir l'eau arriver un peu trop vite à son gout sur le haut de son corps. Elle protesta, par réflexe, devant de tels enfantillages.

Prête à entendre une fois de plus un florilège de remarques outrageusement vantarde auxquels elle répondrait avec tout autant d'ironie enjôleuse, dame nature en décida autrement. Comme pour le punir d'une fanfaronnade exagérée, Ray se tomba dans l'eau, éclaboussant un peu plus Thérèse au passage. Elle qui comptait garder ses cheveux au sec, c'était raté.

— ça t'apprendras à parler trop vite!

Ray semblait avoir une foutue préposition pour finir par terre. Enfin, ça, Thérèse n'en avait qu'un vague souvenir, pas tout à fait sur de vouloir savoir tout ce qu'elle avait fait pendant cette fameuse soirée. Peut être que dans quelques jours, elle aurait le courage de demander a ses amis ce qu'il en était. Amusée, Thérèse se dirigea vers Ray, histoire de vérifier que tout allait bien. Ça aurait été dommage de l'abimer, franchement.

— ça va ? pas trop mal à ton égo ?

Elle se tenait devant lui, légèrement penchée - pour une fois qu'elle était plus grande que lui - les bras croisés, en attente d'une réponse quelconque, un sourire espiègle aux lèvres. En espérant que ça lui serve de leçon. La nature jouait parfois de drôles de tours avec un timing particulièrement hilarant, il fallait bien se l'avouer.

Ray Edwards;

Il ressortit la tête de l'eau à peine 2 secondes plus tard, ses mèches cendrées collées à son front, ses joues presque aussi rouges que son maillot de bain. La gravité semblait faire particulièrement effet sur lui ces derniers jours, il s'était rarement autant ramassé en si peu de temps. Assis sur les fesses, il dégagea ses cheveux de devant ses yeux et recracha l'eau qu'il venait d'avaler.

— si, râla t-il en regardant autour de lui pour voir si quelqu'un d'autre que Thérèse l'avait vu tomber comme un étron, apparemment toi, heureusement que t'es la seule à avoir vu ça.

Parce que, même si Thérèse allait probablement se moquer de lui, Ray savait très bien que c'était pour plaisanter. Et puis il savait aussi des choses un peu gênantes à son sujet alors il pouvait répliquer facilement. Même si ç'avait été une inconnue, ç'aurait piétiné son image de bad boy super cool. L'avantage avec la brune était que cette image là était déjà piétinée depuis un bon moment. 

— J'aime pas beaucoup ce sourire insolent mademoiselle Sherman, dit il en se retournant vers elle, soutenant son regard.

Évidemment qu'elle se foutait de sa gueule.

Thérèse Sherman;

L'oiseau avait semble-t-il décidé de piquer une tête plus rapidement qu'il ne l'avait prévu. Et Thérèse n'avait certainement pas envie qu'il en advienne de même pour elle. Par sécurité, elle gardait une certaine distance de sécurité, incapable de prévoir ce qu'aurait pu faire un Ray à l'égo vexé.

— monsieur à peur d'entacher sa réputation?

C'était clair comme de l'eau de roche, où au moins comme celle dans laquelle il barbotait bon gré mal gré. Avec Thérèse, il ne craignait pas grand chose. Elle n'avait jamais été franchement adepte des racontars. Et si elle laissait volontiers une oreille curieuse trainer quand ses amies s'y livrait, Thérèse n'aurait jamais osé raconter quoi que ce soit sur qui que ce soit. Du moins, pas sur les personnes auquel elle tenait un minimum. Et Ray avait depuis eu dépassé le minimum.

— moi? jamais!

Voyons, elle n'était pas du genre à se moquer. Ne l'avait-elle pas déjà prouvé à Ray? Malicieuse, elle donna une légère pichenette sur l'épaule de son ami, pour protester de ces accusations honteusement fausses.

— besoin d'aide pour se relever très cher ?

Bon, pas sur que la petite carrure de Thérèse serve à quoi que ce soit dans la manœuvre, mais elle était comme ça, Thérèse, magnanime et polie derrière cette carapace noire. Et puis avec un peu de chance, Ray refuserait, histoire de pas trop froissés son égo de mâle.

Ray Edwards;

C'était un peu superficiel mais Ray n'avait pas honte. Il y'avait tout un tas de chose que l'ainé de la fraterie Edwards n'assumait pas mais le fait qu'il avait une réputation à tenir n'en faisait pas partie.

— exactement !

Le blond était un don Juan, un séducteur, se ramasser dans l'eau ça n'allait pas attirer les donzelles. Ça allait les faire rire au mieux, les faire fuir au pire.

Il s'apprêtait à refuser la proposition de son amie tel le jeune homme vigoureux, indépendant et à l'égo un peu entaché qu'il était. Puis un petit sourire sournois vint prendre place sur ses lèvres et il acquiesça, attrapa la main tendue de Thérèse avant de tirer la demoiselle vers lui pour la faire basculer sur son épaule alors qu'il se relevait.

Il parcourut une dizaine de mètres avec la brune, portée comme un sac à patates qui braillait sur son épaule. Ray était un petit con, un gamin, alors forcément, Thérèse allait finir dans l'eau, c'était inévitable. Mais avant ça il allait la faire râler un peu

— T'as pas trop chaud ? demanda t-il en tournant la tête vers le visage de la brune.

Thérèse Sherman;

Face à l'aveu de Ray, Thérèse eu un air de triomphe qui se transforma bien vite lorsqu'elle sentit son poids se soulever mystérieusement dans les airs. Elle aurait bien du se douter que son acte de gentillesse allait se retourner malencontreusement contre elle. Et Thérèse promit qu'on ne lui reprendrait plus. Profitant de sa faiblesse, Ray en avait profiter pour l'attraper comme un vulgaire sac à patate, encore un inconvénient d'être aussi menue. Le second était que de ses petits poings, elle tapait le dos de Ray pour qu'il la lâche, en vain. Parce que si elle ne sentait pas sa force, Thérèse n'allait pas non plus assommer son camarade. Un peu de bon sens. Et Thérèse tenait à la vie. Ou au moins, à passer une après-midi agréable sans couac.

— lâche moi!

Pas folle, Thérèse savait bien que rien ne le ferait la lâcher et qu'elle allait bientôt rejoindre l'eau dans laquelle il avait glissé quelques secondes auparavant. Et puis c'était pas très agréable d'être ballotée comme ça non plus.

—fait pas quelque chose que tu pourrais regretter!

Et la jeune femme pris son ton le plus menaçant. Son propre égo, pas aussi développé que celui de Ray mais quand même bien présent en prenait à son tour un coup. Elle qui aimait bien être l'instigatrice des mauvaises taquineries amicales, et pas la victime de ce genre de coup.

— s'il te plait?

Elle tenta cette fois si la méthode douce, avec une petite moue triste qui implorait Ray de la reposer délicatement au sol et d'oublier ses petites moqueries. Pas sur non plus que ça marche, mais elle aurait essayé. C'était là la seule réponse qu'il obtiendrait de Thérèse alors qu'il se moquait pour la énième fois d'elle. S'en était vraiment agaçant, mais elle ne faisait rien pour totalement l'en empêcher.

Ray Edwards;

Il savait qu'il s'exposait potentiellement à la colère terrible de la demoiselle. Est-ce que sur le moment il en avait quelque chose à faire ? Non. Est-ce qu'il allait potentiellement regretter son acte ? Oui, probablement. Thérèse était une brindille alors ses petits poings, bien que féroces, n'arrivèrent pas à faire lâcher prise l'oiseau de feu. Elle essaya même de l'amadouer, avec une expression suppliante sur le visage. Bien essayé mais ça ne marchait pas, Ray n'avait pas de pitié lorsqu'il s'agissait de faire des bêtises. Après s'être assuré que l'eau était assez profonde pour ne pas qu'elle se fasse mal en se cognant au fond, il balança Thérèse à l'eau, comme si elle ne pesait rien.

Si "qui aime bien châtie bien" alors Ray devait beaucoup aimer Thérèse car la pauvre était la victime de toutes ses taquineries pas toujours drôles. 

Il regarda sa camarade faire un petit vol plané avant qu'une gerbe d'eau n'accompagne sous passage sous la surface. Un grand sourire d'imbécile ornait son visage alors qu'il gardait les yeux rivés sur l'endroit où elle était tombée, au cas où elle aurait un problème. Après tout elle parlait de noyade il y'a quelques instants.

Le fils Edwards était terriblement fier de lui, bon sang ce qu'il était drôle.